Assis sur les marches de l’escalator sans fin, tout en cristal, dans le vide d’un ciel clair à perte de vue, je suis dos à A. qui est assis une marche plus haut.
Il me raconte son voyage à Bernique avec S. et C.
Comme toujours, sa manière de raconter ses périples est pleine de finesse et le regard lucide et cocasse qu’il porte sur les lieux et les gens sont à mourir de rire.
Mais justement, je ne dois pas rire. Mon médecin me l’a formellement déconseillé. Je pourrais mourir sinon.
Et c’est terrible de l’entendre, si enjoué, narrer les situations loufoques où ils se sont trouvés, à prendre des douches sous les bombes de Sarajevo, entouré de tuberculeux à Sanaâ, manger des plourds empoisonnés à Cubase.
Cela me coûte un effort monstrueux de ne pas laisser sortir ce rire profond qui veut tout emporter.
C’est alors que je vois monter vers nous le Joker, défiguré par la grimace qui maquille sa bouche. Il me fixe et articule péniblement que j’ai le choix entre rire et mourir ou ne pas rire et être déjà mort.
Je botte en touche et choisis de me réveiller.