« Rassure-toi, me dit Cruella en me prenant par le bras, les bananes vertes sont inoffensives. C’est quand elles mûrissent qu’elles attaquent. Les pires, c’est celles avec les grosses tâches noires : elles sont gluantes. »
Nous avançons dans les allées d’un hyper-hypermarché, croisant de grandes bananes vertes qui font leurs courses sans nous prêter la moindre attention.
Je me sens triste parce que ce magasin a changé d’enseigne : le Leclerc est devenu un Carrefour. Et je n’aime pas Carrefour. La clientèle y est plus petite, le personnel plus méfiant.
Cruella a disparu tandis que je débouche dans le rayon légumes. La vue des poireaux m’amuse. Avec leurs racines touffues de longs poils blanc-verts, semblables à des caniches de barbarie. Les pommes sont si grosses et si mûres qu’elles pourraient exploser comme des grenades.
L’instant d’après je suis assis dans le métro, seul dans la rame, hagard.