Je suis un canard. Un gros canard vert et bleu. Difficile de se mouvoir avec ces grosses pattes palmées, qui frottent le sol rèche de ce chemin de campagne à chaque pas.
Il faut impérativement que j’atteigne la mare avant la nuit. J’ignore pourquoi, mais cette urgence est vitale.
J’avance péniblement, me dandinant ridiculement. Et ces mots que je veux dire, ces ahanements que je veux pousser se transforment en couacs dissonants.
Honteux devant l’impuissance où cette nouvelle nature me plonge, je me refugie dans un bosquet, cheminant parmi les ronces qui égratignent mon plumage.
Il fait sombre et frais. La nuit tombe. Je me love et m’endors.