la gargouille

D’apparence exterieure, c’est une étrange maison en bois, archétipale des films d’angoisse hollywoodiens. Sans doute le seul point commun entre Amityville, Psychose, La Famille Adams et L’Etrange Noël de Monsieur Jack. Grise, de guingois, rafistolée à la va comme je te pousse. Les portes grincent et des toiles d’araignées font office de filtres anti-insectes.

A l’intérieur, c’est une toute autre histoire. On est dans les ors des palais, tentures rouges de velours épais, candélabres, meubles et parquets marquettés, orfevrerie sur les tables, horloges sous cloches de verre, posées sur de monumentales cheminées de marbre rose. Une lumière jaune orangée règne partout, dans un clair obscur digne du Maitre flamand. C’est cette fois le cinéma européen qui est à l’honneur : on pense à Amadeus, à Danton, aux Liaisons Dangereuses.

Autant l’extérieur est lugubre et grossier, autant l’intérieur est joyeux et raffiné. Un chant d’allégresse me parvient du rez-de-chaussée.

Dans cette chambre où je gis nu sur un tapis de Perse, flotte une odeur d’encens. La lumière tamisée projette des pans d’ombre noirs comme le vide aux quatre coins de la grande pièce. Au plafond, de riches moulures peintes et au centre, dans la rosace, au lieu du lustre est fixé un miroir piqué de tâches grises.

Le miroir renvoit l’image de mon corps décharné. Celui d’un vieillard aux cheveux blancs, aux yeux creusés et au regard vide, au sourire édenté, à la barbe sale et mal taillée. Près de la fenêtre, à contre-jour, derrière ma tête, une gargouille est assise dans un fauteuil Voltaire, un porte cigarette d’un mètre en bakélite noir à la main. Jambes croisées, elle me regarde avec envie de ses yeux rouges sans pupilles.

La gargouille décroise les jambes et commence à se caresser le haut des cuisses. Sa peau verte prend une teinte émeraude fascinante. Je sens un désir violent monter en moi. Mon sexe se dresse, interminable et palpitant. Je refuse cette excitation qui me submerge, je ne veux pas que cette gargouille me touche, elle me dégoûte, ou m’effraie plus exactement.

J’entends ses râles croitre à mesure que ses caresses approchent sont sexe béant et luisant. Elle fait cela pour moi, pour m’exciter, elle a envie de moi, besoin de moi. Je refuse, je ferme les yeux mais son image me parvient malgré tout dans le miroir. Mon corps en fonte est comme cloué au plancher gras de cire fraiche, mon sexe gonflé me fait mal.

La gargouille enfin se redresse, se penche en avant et tombe genoux écartés sur mes épaules. Son bas ventre couvre mon visage et m’étouffe. Je secoue la tète, essaye de desserrer l’étau mais je ne parviens qu’à approcher ma bouche de sa vulve. Elle frotte son clitoris contre mon nez et son vagin aspire avec avidité ma langue et l’air de mes poumons.

Je perds la conscience de l’horreur de la situation et me trouve dans un état second, avide à mon tour de boire à cette source de vie démoniaque. Le sang de ses menstrues coule dans ma gorge, macule mon visage. La verge me brûle, je supplie la gargouille de calmer ce désir douloureux, proche de l’embrasement. Elle me sourit de toutes ses dents pointues et prend mon sexe dans sa main aux longs doigts griffus. Aussitôt celui-ci s’enflamme et je hurle de douleur et de jouissance absolues. Mon cri fait écho dans les entrailles de la bête, qui recule et se plante littéralement sur mon sexe comme on s’enfonce un kusungobu dans le ventre das la cérémonie du hara-kiri. La moiteur de son sexe ne suffit pas à calmer le feu qui consume le mien. Ses cris de jouissance mauvaise couvrent mes hurlements de douleur.

Lorsque le feu s’éteint, ma verge n’est plus qu’un tas de cendres. La gargouille, repue, se met à battre des ailes et s’élève dans les airs. Le vent frais qu’elle provoque disperse les cendres et m’apaise. Asexué, je me sens Un.

Tandis que la gargouille disparait par la fenêtre, je me drape du rideau que j’ai arraché, et m’endors.

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